On défigure la Kasbah de Boulaâouane !

Ba M'hammed est mort! Le vieux charbonnier de la Cité portugaise nous a quittés, il y a quelques jours. Cette figure nous était si familière qu'on avait l'impression qu'elle aussi avait été classée patrimoine mondial !

Plus que centenaire, selon des proches, il aurait vécu sous trois Rois , M'Hammed Salsali Ould Daouia vivait là depuis qu'avec sa famille, il avait quitté la région d'Essaouira, au tout début du siècle dernier , pour fuir une famine qui décimait les populations locales.

Il s'était d'abord installé dans le quartier des boulangers, et avec sa femme, il s'était spécialisé dans la fabrication du pain d'orge. Puis, il avait abandonné le fournil pour une minuscule boutique sur la rue principale de la Cité, Rua Carrera, où il vendait du charbon.
De son petit tabouret, il voyait défiler, devant sa boutique, des centaines et des centaines de touristes qui se rendaient sur les remparts. Mais Ba M'Hammed, comme l'appelaient si affectueusement les habitants de la Cité, n'aura pas vu longtemps la Porte de la mer enfin restaurée!

Un travail remarquable qu'il convient de souligner, d'autant qu'ici même, à l'unisson de ceux qui aiment profondément cette Cité, nous avons maintes fois déploré son état de délabrement. Mais les choses bougent enfin ! La Porte est restaurée, le «Brimil» qui menaçait de s'effondrer est lui aussi réparé.

On est en train de réaménager les remparts en remplaçant les pavés que des garnements avaient enlevés, les différentes portes seront elles aussi refaites, un centre d'exposition, à l'entrée de la Cité, sera bientôt ouvert au public…

Azzeddine Karra, le directeur du Centre des études et de recherches du patrimoine luso-marocain fait du bon boulot. Il convient de l'encourager.

Cependant, nous étions scandalisés lorsque nous nous sommes rendus à la Kasbah de Boulaâouane, que nous voulions faire visiter à quelques amis marocains et portugais....
Quelle ne fut pas notre surprise de voir que les services de l' ONE avaient planté, sur la façade de cette kasbah, le seul côté presque intact, des pylônes pour l'électrification des villages voisins.

Ne pouvait-on pas les faire passer ailleurs qu'à quelques centimètres des murailles, défigurées par ces câbles et ces piliers... Même le vieux gardien est en colère! En voyant ce désastre, l'un de nos amis marocains nous a dit: " Mais alors que l'on répare ici, on défigure ailleurs ! La kasbah de Boulaâouane, l'autre pôle attractif des Doukkala, qui surplombe fièrement l'Oum Er'Rbia
et ses méandres majestueux, offre l'affreux spectacle d'une façade balafrée par des pylônes électriques."

Certes, on ne peut que se féliciter que l'électricité pénètre dans nos campagnes, et tous les villages du Royaume doivent être au plus tôt électrifiés.

Mais personne n'a dit que cela devait se faire au dépens de l'un des monuments les plus prestigieux de la région.
D'autant que rien ne s'oppose, semble-t-il, à ce que les pylônes et les fils électriques qui les unissent suivent un autre chemin, ou passent même sous terre. Là, non. Trois pylônes plantés devant l'auguste façade.

Comme d'immenses poils absurdes sur un visage. Et l'un de ces poils, en plein devant la porte principale.

Les touristes qui viendront visiter ces vestiges d'un glorieux passé ne pourront plus photographier cette façade, telle que le Sultan Moulay Ismaïl voulait, en 1704, la laisser pour la postérité. Et dire que nous pensions que cette page d'histoire serait éternelle !…

Que diront les hôtes de nos plus hautes autorités lorsqu'elles les emmèneront prendre part à une festivité, sous une tente caïdale en aplomb du plus grand fleuve du Maroc… et surtout, que leur répondra-t-on, quand on dira que ce site est pourtant classé Monument historique, par le dahir du 11 mars 1924(cf. B.O n°955 d'avril 1924) ?

Comme l'est tout aussi l'ancien minaret de Tit, à Moulay Abdallah.
Là aussi, a-t-on vu ce qui s'y fait, dans la plus grande indifférence, semble-t-il ?

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Centre touristique attrayant

La Kasbah de Boulaâouane est située sur la rive gauche de l'oued Oum Er'Rbia, à 80 km à l'est d'El Jadida. Elle fait partie de la circonscription de Khémis M'touh et elle est accessible par la RN _ 1 et par la RR 316. Elle daterait de l'époque du Sultan Almohade Abdelmoumen Ben Ali. Elle fut dominée pour une certaine période par les Portugais avant qu'elle ne soit reconstruite en 1704 par le Sultan alaouite Moulay Ismaïl.

La Kasbah de Boulaâouane et ses alentours peuvent se donner l'oscar des centres touristiques les plus attrayants du Maroc, vu qu'ils disposent de tous les atouts qui peuvent enchanter et intéresser le touriste, surtout après la réalisation du plan azur d'El Haouzia par le groupe international Kerzner, du nom de son fondateur sud-africain, Sol Kerzner, créateur de Sun City dans l'Ouest de l'Afrique du Sud, le Las Vegas africain et de Paradise Islande aux Bahamas.