Naissance de SAR Lalla Khadija

Dilemme des exilés subsahariens

La tension est particulièrement observable en raison de la position stratégique de l'Oriental

30 Janvier 2007 À 15:33

Lors de la tenue du colloque international d'Oujda sur le thème "L'Oriental face à l'immigration des Subsahariens", le professeur Jérôme Valluy, maître de conférences en sciences politiques à l'université Panthéon – Sorbonne (Paris 1), membre du centre de recherches politiques de la Sorbonne et associé au centre d'études africaines, (C.N.R.S / E.H.E.S.S), a présenté une communication sur les "contraintes et dilemmes des actions de solidarité avec les exilés subsahariens en transit au Maroc oriental dans le contexte créé par les politiques européennes d'externalisation de l'asile", communication dont voici une synthèse : "La politique européenne d'externalisation de l'asile initiée à la fin de l'année 2002 et formalisée dans le "programme de Lahaye" de novembre 2004 vise à développer les capacités d'accueil des pays limitrophes de l'Union européenne, afin de réduire les entrées sur son territoire.

La mise en œuvre actuelle de cette politique conduit à renforcer le blocage policier et militaire des frontières en enrôlant les pays limitrophes dans cette démarche et à accroître leurs capacités de prise en charge, non seulement policière, mais aussi humanitaire, des exilés en transit.

Sur le versant humanitaire de cette politique, les organisations, référées au droit d'asile et au devoir de solidarité se trouvent incitées politiquement et financièrement par la Commission européenne à améliorer les conditions d'accueil des migrants subsahariens dans tous les pays du Maghreb.

Les organisations, mais aussi l'ensemble des acteurs de solidarité (citoyens ordinaires, associations…) se trouvent ainsi placés dans une situation très complexe et souvent délicate, parfois même ambiguë, entre le projet humaniste et caritatif d'aider des personnes dans le besoin et le risque d'agir au service de finalités contraires, anti-migratoires, qui sont celles de l'Europe.

Cette tension est particulièrement observable dans la région orientale du Maroc (Oujda, Berkane, Nador) en raison de sa position stratégique sur la route migratoire, de sa proximité de la frontière algérienne mais aussi en raison logiques des milieux de la solidarité, plus autonomes qu'ailleurs et plus soucieux de trouver les modalités pratiques d'une aide aux exilés tout à la fois conforme aux traditions ancestrales d'hospitalité à l'égard des voyageurs de passage et indépendantes de ces nouvelles politiques publiques européennes dites de "capacity building".

A cet égard, les acteurs de la solidarité dans l'Oriental conservent une autonomie d'action qui contraste fortement avec les démarches d'organisations marocaines ou européennes intervenant dans le centre du pays à l'aide de financements européens.

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L'Oriental face à l'immigration

La ville d'Oujda a abrité récemment un colloque de réflexion sur le thème "L'Oriental face à l'immigration des Subsahariens”, colloque organisé par le bureau régional pour l'Afrique du Nord de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et Croissant-Rouge marocain d'Oujda, en partenariat avec la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales.

Etant l'un des défis majeurs de ce siècle, des universitaires et acteurs de terrain maghrébins et européens se sont donc réunis à Oujda, dans une région du Maroc considérée comme l'une des principales zones d'Afrique du Nord où transitent des milliers de personnes d'Afrique subsaharienne fuyant les conflits civils ou la pauvreté et cherchant à rallier l'Europe en quête d'une vie meilleure.

Le chef de la délégation de ladite fédération (délégation basée à Tunis), Mme Anne Leclerc, a rappelé que les phénomènes de migration constituent l'un des défis majeurs de ce siècle, ajoutant que "comme acteurs humanitaires, nous avons un nombre toujours plus important de personnes fragilisées, rendues particulièrement vulnérables par la précarité de leurs conditions de vie.”Elle a précisé que par cette initiative, la Fédération internationale entend encourager le dialogue et la réflexion afin d'apporter une réponse humanitaire adaptée à la situation des migrants, une réponse qui s'inscrit dans le respect des principes fondamentaux de "notre mouvement” et plus particulièrement les principes d'humanité, de neutralité et d'impartialité.
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