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La disparition de l'abbé Pierre

Le fondateur d'Emmaüs s'est éteint à l'âge de 94 ans

22 Janvier 2007 À 15:25

L'abbé Pierre, fondateur du Mouvement Emmaüs et défenseur des déshérités, est mort lundi à Paris à l'âge de 94 ans, a annoncé Emmaüs France. Le décès est survenu à 5h25 à l'hôpital du Val-de-Grâce.

L'abbé Pierre fut longtemps la personnalité la plus populaire auprès des Français, jusqu'à ce qu'il demande que son nom soit retiré des enquêtes de popularité, et sa disparition a suscité une vive émotion en France, jusqu'au sommet de l'Etat.
De son vrai nom Henri Grouès, "il est décédé à 5h25 entouré de ses proches, après une semaine d'hospitalisation", a déclaré une porte-parole de l'organisation créée en 1949.
Ancien résistant et ancien député, il avait lancé en février 1954 un appel resté célèbre en faveur des sans-abri et des mal logés, une cause qu'il n'avait jamais cessé de défendre.

Il avait été hospitalisé le 14 janvier pour une bronchite. "C'est un bilan de santé qui avait été avancé parce qu'il souffrait d'une bronchite", a dit la porte-parole. Cette bronchite a dégénéré en infection pulmonaire, cause, semble-t-il, de sa mort. "L'œuvre de l'abbé Pierre continue. C'est ce qu'il voulait", a ajouté la porte-parole. "L'abbé Pierre n'a pas de successeur.

C'est notre fondateur. Le mouvement continuera tel que l'a souhaité l'abbé Pierre."
Sa mort a suscité une avalanche de réactions attristées et d'hommages, notamment de la part d'hommes politiques. Le président Jacques Chirac s'est dit "bouleversé" par la mort du prêtre. "Avec la disparition de l'abbé Pierre, c'est la France entière qui est touchée au cœur.

Elle perd une immense figure, une conscience, une incarnation de la bonté", a-t-il déclaré dans un communiqué. "L'abbé Pierre représentera toujours l'esprit de révolte contre la misère, la souffrance, l'injustice et la force de la solidarité", a-t-il ajouté. "Le Premier ministre, Dominique de Villepin, a salué 'une force d'indignation capable de faire bouger les cœurs et les consciences'". Pour le fondateur du Samu social, Xavier Emmanuelli, le "droit opposable au logement", que le gouvernement a décidé de faire voter par le Parlement, est l'aboutissement de son combat, au moment où il disparaît.

L'abbé Pierre est resté célèbre par l'appel à "l'insurrection de la bonté" qu'il a lancé le 1er février 1954, pendant un hiver particulièrement rigoureux, en faveur des sans-abri et des mal logés. Cet appel survint après la mort, à cause du froid, d'une femme sur un trottoir du boulevard Sébastopol à Paris. "Chaque nuit, ils sont plus de 2.000, recroquevillés sous le gel, sans toit, sans pain, plus d'un presque nu", déclare-t-il alors sur les ondes de Radio-Luxembourg, ancêtre de RTL.


"Il faut que ce soir même, dans toutes les villes de France, dans chaque quartier de Paris, des pancartes s'accrochent sous une lumière dans la nuit, à la porte de lieux où il y ait couvertures, paille, soupe et où on lise sous ce titre, 'Centre fraternel de dépannage', ces simples mots : 'Toi qui souffre, qui que tu sois, entre, dors, mange, reprend espoir, ici on t'aime'", ajoute-t-il. Pour l'ancien ministre socialiste et fondateur de Médecins sans frontières, Bernard Kouchner, le prêtre à la barbe blanche et à l'éternelle soutane avait "inventé la loi du tapage" pour faire avancer la cause des déshérités.

Cinquième enfant d'une famille aisée - son père était négociant en textile à Lyon - Henri Grouès avait été saisi par la vocation religieuse dès l'adolescence et était devenu franciscain. Il s'était engagé dans la Résistance pendant l'occupation allemande de la France, sous le nom d'abbé Pierre.

Il avait alors caché des Juifs et rencontré le général Charles de Gaulle, chef de la France Libre, en 1943 à Alger. Après la guerre, il avait été député de Meurthe-et-Moselle, de 1945 à 1951.
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