Économie

La production mondiale en hausse, le dérèglement climatique guette

La production mondiale des deux variétés de thé, vert et noir, devrait augmenter chaque année de 7,5% et de 2,2% pour atteindre respectivement 3,6 et 4,4 millions de tonnes en 2027. Mais la culture de cet arbuste, qui donne la boisson le plus consommée au monde et ce n'est pas le Maroc qui contredirait cette donnée, est concentrée dans de rares endroits au monde, là où ensoleillement et précipitations sont présents tout au long de l'année. Et ce sont justement ces étages bioclimatiques qui pâtissent le plus du dérèglement climatique.

Le thé a besoin de beaucoup de soleil et d’importantes précipitations comprises entre 1.000 et 1.700 millimètres par an. De plus, la pluie doit être régulièrement répartie tout au long de l’année. Ph. DR

29 Mai 2018 À 16:47

Réuni avant-hier à Hangzhou, en Chine, le Groupe intergouvernemental de la FAO sur le thé a indiqué que la production mondiale du thé suit une courbe ascendante qui devrait se maintenir les dix prochaines années. À cette échéance, la production mondiale du thé vert sera de 3,6 millions de tonnes et celle de la variété noire de 4,4 millions de tonnes «reflétant ainsi une nette hausse de la production en Chine, au Kenya et au Sri Lanka. Ainsi, la Chine atteindrait les niveaux de production du Kenya, le plus grand exportateur de thé noir au monde», écrit l'agence des Nations unies pour l'agriculture et l’alimentation (FAO) sur son portail électronique. Divers classements mettent le thé au premier rang des boissons les plus consommées au monde. En s'adonnant quotidiennement aux rituels du thé tout au long de l'année, les consommateurs marocains ne font que confirmer cette hiérarchie. Le Groupe intergouvernemental de la FAO sur le thé explique ce succès par les bienfaits de cette boisson déshydratante, qui se prend chaude ou fraiche, antioxydante, aux propriétés anti-inflammatoires et de sa contribution à la perte de poids. «Ces bienfaits pour la santé et le bien-être devraient, selon toute vraisemblance, conduire à une hausse de sa consommation dans l'avenir», indique le Groupe intergouvernemental qui cite également la large campagne médiatique faite autour de la boisson qui trouve également preneur auprès des jeunes urbains. Le risque ne vient donc pas d'un éventuel changement des habitudes alimentaires, mais du dérèglement climatique. La culture du thé se pratique dans des endroits spécifiques du monde et requiert des conditions météorologiques tout aussi particulières, jugez-en : «les meilleures qualités de thé sont obtenues en altitude avec une croissance lente, protégées d’une exposition à un soleil trop intense grâce à la brume du matin et du soir (également humidification), sur une pente orientée au Sud, avec beaucoup de soleil et une amplitude thermique importante entre le jour et la nuit», est-il précisé sur un site Internet dédié au thé. De manière générale, poursuit ce même site, le thé a besoin de beaucoup de soleil et d’importantes précipitations, comprises entre 1.000 et 1.700 millimètres par an. De plus, la pluie doit être répartie tout au long de l’année. Dans certaines régions, les champs de thés sont irrigués au début de la saison». Des températures entre 20 et 30 °C offrent les meilleurs résultats. Mais les changements du régime des pluies que subissent les régions tropicales pourraient changer la donne. «Le thé peut uniquement être produit dans des conditions agro-écologiques spécifiques et délimitées par conséquent dans un très petit nombre de pays dont beaucoup sont fortement affectés par le changement climatique», avertit le Groupe intergouvernemental de la FAO sur le thé. Selon ce dernier, les changements de température et les régimes de pluies, avec davantage d'inondations et de sécheresses, affectent déjà les rendements, la qualité du thé et ses prix et contribuent donc à faire baisser les revenus et à menacer les moyens d'existence ruraux. Au Kenya, à titre d'exemple, des précipitations irrégulières ont engendré une baisse de 16,2% de la production de thé au cours du premier semestre de 2011. D’après le Tea Board of Kenya, la production totale était de «178,4 millions de kilogrammes de thé durant les six premiers mois de 2011 contre 212,4 millions de kilogrammes pour la même période de l’année précédente». La production des petits agriculteurs a chuté de 124,3 millions de kilogrammes à 105,8 millions, avec une production basée sur les plantations en forte baisse, de 88,1 millions de kilogrammes à 72,6 millions. «Une nouvelle carte des zones de production du thé au Kenya suggère, cependant, que le changement climatique commence à avoir de sérieux effets sur les régions où le thé peut être produit», rapporte le site Agritrade, site Internet du commerce des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. À la fin de cette décennie, les principales zones de production du thé actuelles pourraient devenir moins adaptées à cette culture et, en 2050, elles pourraient totalement disparaître, poursuit le même site selon lequel le Centre international d'agriculture tropicale a averti que les régions de culture du thé actuelles au Kenya vont radicalement changer.

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