Économie

Chantage émotionnel, comment y faire face ?

En milieu professionnel, le chantage émotionnel est une des situations les plus difficiles à gérer. Elle implique notamment qu’un manager ou un collaborateur utilise les faiblesses émotionnelles de son interlocuteur pour parvenir à ses fins. Une stratégie qui crée des relations toxiques et qui engendre des situations de malaise et de doute. Comment y faire face ? Quelques astuces avec Leïla Naïm, professeur chercheur en communication et comportement, coach consultante senior et responsable du master RH à ESCA École de Management.

En milieu professionnel, certains managers utilisent le chantage émotionnel ou affectif pour gérer des personnes hyper-sensibles et empathiques.

03 Janvier 2018 À 19:21

Éco-Conseil : Le chantage émotionnel a-t-il une place dans la vie professionnelle ?

Leïla Naïm : Effectivement, le chantage émotionnel constitue l’une des situations les plus difficiles à gérer en entreprise. Comme son nom l’indique, il consiste à utiliser les faiblesses émotionnelles et affectives pour faire chanter son interlocuteur et parvenir à des fins personnelles ou encore d’entreprise. Cela peut aller loin vu que le maître chanteur peut recourir à des menaces et des persécutions. Son objectif à lui étant de créer un rapport de force qui le met en situation de confort lors notamment des négociations. Les personnes qui utilisent ce type de chantage sont généralement soit des personnes qui souffrent d’un manque de confiance en soi et qui sont incapables d’influencer positivement les autres, soit des individus qui n’ont pas appris à échanger sainement avec leurs interlocuteurs. Ils créent des relations toxiques où le jeu du pouvoir est illicite et l’enjeu tourne autour de la manipulation plutôt que la collaboration. De même, en milieu professionnel, certains managers utilisent le chantage émotionnel ou affectif pour gérer des personnes hyper-sensibles et empathiques. Ils utilisent la menace et créent le doute chez le collaborateur et peuvent même adopter la posture de victime afin de satisfaire leurs propres besoins, ce qui n’est pas une bonne chose. Rappelons que les relations surtout entre le manager et ses collaborateurs doivent être basées sur la confiance et le respect.

 

Quels sont les signes d’un chantage émotionnel ?

Pour répondre à votre question, je dirai que le maître-chanteur incarne plusieurs rôles en fonction des situations. Il fera en sorte de stimuler certaines règles qui régissent naturellement la vie sociale. Il peut, par exemple, adopter la posture de la victime pour pousser son interlocuteur à ressentir le sentiment de culpabilité et à céder à ses souhaits. Ainsi, pour reconnaître que l’on est face à ce manipulateur, il faut être attentif à certains signes du type :

• Un sentiment d’infériorité et une perte de repère quand on est face à une personne.

• Une diminution de confiance en soi à chaque échange avec le manipulateur.

• Un sentiment de culpabilité que l’on ressent toujours avec la même personne.

• Une baisse du moral et une tendance de céder rapidement lors de la négociation.

• Une incapacité de dire non.

Il faut aussi être attentif à certains symptômes physiques :

• Des états de stress, d’anxiété de fatigue, voire de dépression.

• Une somatisation avec des maux de tête et des douleurs abdominales.

• Des troubles d’appétit et de sommeil.

La liste des signes reste non exhaustive, mais soulignons qu’il faut être attentif à tout changement dans son corps et son cerveau pour pouvoir identifier le problème. Soulignons également que la culpabilité engagée par la personne qui manipule s’accompagne de différentes attitudes, notamment le sourire affiché tout le temps, l’ironie et la dévalorisation de l’autre sous le couvert de pseudo encouragements ou compliments.

 

Quelle stratégie privilégier pour y faire face ?

Certes, il n’y a pas de recette magique pour faire face à un chantage émotionnel, tout dépend du contexte et de la nature de la relation, toutefois un travail sur soi s’impose. Ce travail consiste à avoir plus de confiance en soi et bannir les croyances et les attitudes négatives. Il faut aussi travailler sur ses points de faiblesse et ses limites. Je recommande aussi d’adopter la position OK++ qui, selon Éric Berne, permet d’engager la discussion à partir de la position «J’ai de la valeur, tu as de la valeur». Cela pourrait être traduit, comme cela a été évoqué par la psychologue Isabelle Levert dans son livre, concrètement à travers des attitudes, entre autres :

• Agir pour mettre fin au piège.

• Tenir à distance le manipulateur, si possible, ou prendre de la distance vis-à-vis de ses manigances.

• Afficher l'indifférence face à ses tentatives de dévalorisation, de culpabilisation ou de déstabilisation. 

• Arrêter de se justifier.

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