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Quelle politique privilégier ?

«Faire le bien fait du bien. C’est une vérité que beaucoup de dirigeants ont du mal à s’avouer», a affirmé Hassan Charraf, dirigeant chercheur, Centre des jeunes dirigeants. Cependant, ajoute-t-il, ceux qui croient à la performance globale et qui mettent l’économie au service de l’homme affirment sans aucune équivoque deux postulats complémentaires. D’une part, il leur semble impossible de s’atteler au bien-être de leurs salariés si eux-mêmes ne se sentent pas bien dans leur peau et dans leur entreprise. D’autre part, ils soulignent qu’il leur serait difficile d’être bien dans une entreprise où leurs collaborateurs se sentiraient mal. Qu'est-ce que «se sentir bien» ? Un salarié heureux est-il un salarié plus rentable ? Le point.

Le bien-être en entreprise est lié à la démarche de performance globale.

16 Octobre 2017 À 17:17

Le Matin : Qu'est-ce que «se sentir bien» en entreprise ?

Hassan Charraf : Un salarié dirait : «En tant que salarié, je me sens bien si je sais pourquoi je travaille, ce qu’on attend de moi, la place que j’occupe, en ayant des conditions matérielles satisfaisantes avec des moments de convivialité, de lien avec les autres, un management humaniste et la possibilité de m’exprimer librement, en connaissant les limites à ne pas dépasser.» Pour ce faire, il incombe aux dirigeants et aux managers de mettre en œuvre ce que l’on pourrait appeler une politique du bien-être en entreprise. C’est-à-dire de créer des conditions favorables à l’amélioration du bien-être de leurs collaborateurs. Les travaux menés jusqu'à aujourd’hui ont mis en avant six grands domaines sur lesquels il est possible d’agir et indiquent pour chacun un certain nombre d’enjeux et de bonnes pratiques susceptibles de développer le bien-être. Ces grands domaines sont : la gouvernance, le management, le développement des compétences, la convivialité, la santé et les conditions de travail. On a fini par se rendre compte que le bien-être est le moteur de la performance globale. Le bien-être en entreprise est lié à la démarche de performance globale. En effet, il apparaît comme une conséquence évidente de la recherche permanente d’un équilibre entre les performances économique, sociale, sociétale, environnementale qui a bien pour objectif la satisfaction de l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise. On peut même aller jusqu'à affirmer que le bien-être est la «finalité» de la performance globale et donc d’une certaine manière, son moteur principal. C’est la recherche du mieux-être pour toutes les parties prenantes qui justifie l’effort d’amélioration incessant qu’exige la performance globale. Autrement dit, rechercher la performance globale pour elle-même n’a pas grand intérêt : ce qui lui donne tout son sens, c’est le mieux-être qu’elle apporte à tous.

Pensez-vous qu’un salarié heureux est un salarié plus rentable ?

Un salarié heureux est-il un salarié plus rentable ? Formulée aussi crûment, la question peut paraître choquante. Elle semble relever d’une vision utilitariste : se servir du bien-être pour gagner plus d’argent. Pourtant, elle mérite d’être posée. Car s’il est possible de montrer que bien-être et meilleure efficacité économique vont de pair, cela devrait pousser tous les chefs d’entreprise à suivre cette voie du bien-être et donc s’engager dans la performance globale. Et l’interrogation «l’entreprise et ses dirigeants doivent-ils se préoccuper du bien-être de leurs salariés ?» trouverait immédiatement sa réponse. Aujourd’hui, il y a peu (ou pas) d’études fiables permettant de mesurer objectivement qu’un salarié bien dans son travail aurait des résultats meilleurs qu’un salarié plus stressé, même si des recherches sur de nouveaux indicateurs sont en cours. Il est même probable que sur le court terme, on puisse obtenir plus d’un individu par la peur, le contrôle et la contrainte que par l’empathie et l’autonomie. Dans la perspective de moyen et long terme qui préoccupe tout chef d’entreprise responsable, le raisonnement est évidemment tout autre. Si les preuves strictement quantifiables manquent, l’observation des entreprises où les salariés sont respectés montre clairement qu’elles n’ont rien à envier, en matière de performance économique, à celles qui sont moins soucieuses de leur personnel et surtout qu’elles sont plus durables et affrontent mieux les crises. 

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