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Le syndrome du sauveur, un frein à la performance en entreprise

Placer la volonté d’aider les autres au rang de nécessité personnelle, telle est la caractéristique du syndrome du sauveur. Un phénomène dont souffrent bon nombre de collaborateurs en entreprise et qui peut coûter cher en termes de performance et d’évolution de carrière. En effet, les victimes de ce syndrome peuvent délaisser leur travail pour se mettre constamment à la disposition des autres. Les motivations de ce syndrome et les astuces pour s’en libérer avec Malgorzata Saadani, coach consultante certifiée ICC, DG d'ANC Communications.

Être disponible et serviable est une grande qualité humaine, à condition que cela ne prenne pas des proportions pathologiques.

18 Septembre 2017 À 17:16

Éco-Conseil : Comment définir le syndrome du sauveur ? Quel est son impact sur la vie professionnelle ?Malgorzata Saadani : Le syndrome du sauveur est un ensemble de réactions et de comportements qui placent la volonté d’apporter de l’aide et d'être constamment au service des autres en tant que nécessité personnelle, au-delà de toute autre considération. Bien sûr, être disponible et serviable est une grande qualité humaine, à condition que cela ne prenne pas des proportions pathologiques et ne s’avère pas finalement nocif pour le sauveur et aussi pour les bénéficiaires de cette aide et pour ses victimes collatérales. En entreprise, le risque le plus évident pour un tel profil est de délaisser son propre travail pour se rendre utile en effectuant celui des collègues. C’est aussi une porte ouverte vers les problèmes dans la gestion du temps, les abus de gentillesse et la répartition inéquitable de la charge du travail. Ensuite, il faut penser aussi aux risques relationnels : il existe des personnes qui n’aiment pas être assistées (voire épiées) et qui éviteront «le sauveur» à titre purement personnel. Enfin, les études des comportements humains ont démontré que chez certaines personnes, l’aide prodiguée (qu’on la sollicite ou non) ne produit pas une réaction de reconnaissance et de sympathie, mais plutôt la frustration et l’ingratitude, en provoquant ce que nous appellerons la haine de la dette (affective ou matérielle).

Quelles sont généralement les motivations de ce syndrome ?Un sauveur a un besoin profond et irrépressible de se sentir utile, apprécié, d’avoir bonne conscience et aussi d’obtenir en retour la reconnaissance de ses efforts et même la célébrité pour ce qu’il a accompli. Cette gratitude pourra être verbale, publique, écrite, symbolique ou de toute autre nature. Parfois, les motivations sont plus complexes : quelqu’un qui n’obtient pas la reconnaissance dans sa vie personnelle cherche à compenser ce manque dans le travail, et vice versa. D’ailleurs, la reconnaissance chez les inconnus est toujours plus facile à obtenir qu’auprès des proches avec qui il y a un historique relationnel parfois compliqué. Je pense qu’en analysant les comportements d’un sauveur il est très édifiant de s’intéresser à ces deux volets de sa vie pour avoir une image plus complète.

Certains avancent que les personnes atteintes de ce syndrome cherchent plutôt à répondre à un besoin de reconnaissance. Êtes-vous du même avis ?C’est certainement vrai en partie, mais je pense qu’il faut nuancer cette affirmation et laisser l’évaluation psychologique individuelle apporter ses conclusions. De plus, il faut bien se rappeler que notre société de communication actuelle encourage ce type de comportements et que toute bonne action est souvent rendue publique pour gagner en notoriété et en validité. Résultat : ceux qui font du bien discrètement sont de plus en plus rares, pendant que les gens aidés deviennent les faire-valoir de leurs bienfaiteurs.

Comment se libérer de ce besoin maladif d'aider les autres, notamment en entreprise ?Tout est une question de proportions et de contextes, en particulier dans le monde du travail. Je tiens à souligner que proposer son aide à un collègue en difficulté est une réaction tout à fait saine et humaine. C’est dans l’exagération que nous pouvons parler des comportements pathologiques. Si tel est le cas, et si la personne concernée en est consciente et veut changer ça, elle peut commencer par apporter plus d’attention et de rigueur à son propre travail : se concentrer sur ses priorités, approfondir les recherches, affiner les rendus. Pour ne pas être trop frustrée, elle peut se réserver quelques plages de temps libre pendant lesquelles elle peut communiquer avec les collègues et les aider si nécessaire. Et surtout, il faut savoir que c’est très gentil de donner de bons conseils, mais c’est encore mieux de s’assurer que les autres en veulent ! 

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