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Maîtrise des coûts : la mesure avant l’action

Dans leur quête de maîtrise des coûts, les managers restent souvent prisonniers de ce que leurs systèmes d’information leur produisent comme données. Or souvent, ceux-ci ne sont pas conçus pour fournir l’éclairage nécessaire à une action de cette envergure, tant ces systèmes sont très agrégés et manquent de richesse et de pertinence requises. En situation de crise, les managers agissent donc dans la précipitation et à vue, commettant ainsi les deux erreurs à éviter dans une initiative de réduction des coûts. Les priorités ne sont pas là où ils pensent.

09 Novembre 2016 À 18:18

La nécessaire comptabilité de gestionLa campagne de maîtrise des coûts en entreprise est souvent l’otage du système d’information en place, son exhaustivité et la richesse des informations qu’il produit. Quand l’entreprise ne dispose que d’une comptabilité financière (générale) basique, elle est forcée à se limiter à l’optimisation des coûts par poste comptable. Quand elle a un début de comptabilité de gestion (analytique) offrant au moins une répartition des charges par entité de l’entreprise (Directions, Départements et Services), sur la base de clés de répartition plus ou moins pertinentes, elle peut dans ce cas mesurer ce que lui coûte chaque subdivision et procéder aux réductions de coûts jugés excessifs. Si elle a, en revanche, investi dans un système qui lui permet d’obtenir des coûts jusqu’aux produits (ou projets), dans ce cas, elle peut procéder à des optimisations plus poussées de ses coûts et de ses charges de structure. Les premiers dépendant des choix industriels et commerciaux de l’entreprise et les secondes de ses choix organisationnels. Plus on détaille les objets d’analyse (poste, entité et produit), plus la baisse des coûts est importante et, surtout, pérenne. Avant donc de «foncer tête baissée» sur les décisions de «Cost Killing», il vaut mieux investir d’abord dans les bons instruments de mesure. Une fois ces instruments mis en place, on peut ranger les principaux frais généraux à réduire en cinq catégories.

Les frais liés aux salairesCes frais peuvent être subdivisés en trois rubriques : effectifs, nombre d’heures travaillées et salaire horaire moyen. En fonction de la criticité de la situation financière de l’entreprise, elle dosera la rubrique par laquelle commencer et l’ampleur de la réduction nécessaire. En situation réellement grave, elle priorisera la réduction des effectifs. Dans ce cas, elle commencera par les extrémités, à savoir les collaborateurs proches de la retraite, les nouvelles recrues et celles non encore titularisées. Elle tâchera, par ailleurs, de ne pas remplacer les départs à la retraite et à geler les embauches (sauf dans les postes touchant la marche de l’entreprise). Pour ce qui est du nombre d’heures travaillées, celles-ci doivent servir de variables conjoncturelles d’ajustement, en cas de forte saisonnalité de l’activité ou de baisse momentanée du carnet de commandes. Enfin, s’agissant du salaire moyen, l’entreprise procèdera par entonnoir inversé. Elle rationalisera d’abord le recours aux heures supplémentaires, ensuite, elle réduira les primes et les autres avantages et, in fine, en accord avec les salariés et dans les cas réellement critiques, elle touchera les salaires de base eux-mêmes.

Les frais liés aux terrains et aux locauxEn règle générale, les terrains et les locaux doivent soit être utilisés pleinement, soit mis à la location, soit cédés. Leur usage doit être rationnel et en conformité avec les besoins de l’entreprise. Il est, en effet, inutile d’avoir des archives qui occupent de grands espaces en plein centre-ville où le foncier est onéreux. L’optimisation de ce poste commence par le dimensionnement quantitatif (espaces réellement nécessaires pour exercer l’activité), en recourant à des normes, tenant compte de l’ergonomie et du coût de l’espace mis à disposition. Le dimensionnement est également qualitatif, en veillant à déménager certaines fonctions de l’entreprise dans des zones aménagées, où l’exploitation est moins onéreuse (zones industrielles, centres d’affaires, etc.).

Les frais liés à l’outil de productionLa même règle générale s’applique également à l’outil de production. Les actifs insuffisamment utilisés (machines, matériel roulant, usines ou divisions de l’entreprise) doivent être cédés, en vue de dégager de la trésorerie pour financer la restructuration de l’entreprise. Les managers doivent également organiser un inventaire régulier de leurs immobilisations, en vue de sortir de leurs bilans celles qu’ils n’utilisent plus et figurent toujours dans les fichiers. En effet, la base de calcul de certains frais (taxes locales, assurances, etc.) est assise sur le montant figurant dans les fichiers comptables, indépendamment de la réelle utilisation de l’immobilisation elle-même. Par ailleurs, le renouvellement du matériel permet de réduire les coûts de production (consommation d’énergie, économie de main-d’œuvre, etc.) et les frais d’exploitation (entretiens, réparations, etc.).

Les frais liés aux relations contractuellesCes frais sont générés pour l’entreprise, à l’occasion de ses achats de biens et services auprès des différents fournisseurs. À ce titre, l’entreprise doit faire jouer au maximum la concurrence et le faire savoir. Elle doit, en outre, accorder une attention particulière à ses contrats avec les prestataires, notamment sur les clauses courantes (prix, quantités, qualité, remises, responsabilités, indexation, etc.). Les acheteurs doivent aussi maintenir une veille régulière sur l’évolution des prix du marché de leurs différents achats, en vue d’exiger de leurs fournisseurs de s’y aligner et de prévoir cette clause d’indexation dans les contrats. En outre, il est important que les acheteurs de l’entreprise aient une idée, même vague, sur les coûts d’achat et de production de leurs différents inputs. Ceci leur sera fort utile dans les négociations de prix.

Les frais liés au financementCes frais sont souvent le résultat d’une insuffisante maîtrise par l’entreprise de son cycle d’exploitation et justifient son recours aux financements à court terme auprès des banques. Avant de négocier les taux et les frais bancaires, les managers doivent s’attaquer à la source du mal, à savoir la non-maîtrise des coûts de revient et le dérapage du besoin en fonds de roulement (créances clients, stocks et dettes fournisseurs), car le montant et la durée du financement en dépendent grandement. Cette démarche permet certes d’engranger quelques économies, mais les performances spectaculaires ne sont obtenues qu’en enlevant le filtre trompeur de la structure. 

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